Récompense pour l'étude de l'eau chlorée sur l'émail Récompense pour l'étude de l'eau chlorée sur l'émail

Récompense pour l'étude de l'eau chlorée sur l'émail

Publié le 5 mars 2024.

Saviez-vous que l’eau chlorée des piscines a une incidence sur l’émail des dents ? Le Dr Hamed Smida a été récompensé du Prix de thèse ADF Dentsply Sirona 2023, dans la catégorie sujets scientifiques d'intérêt, pour son travail sur les répercussions de la pratique prolongée des activités de la natation en piscine traitée au chlore sur la sphère bucco-dentaire.

Pourquoi avoir choisi ce sujet : « La bouche du nageur exposée à l’eau chlorée » ?

Hamed Smida : Ancien maître-nageur devenu chirurgien-dentiste, j’ai souhaité établir un lien entre l’univers de la natation et celui de la santé bucco-dentaire. Dans les piscines, le risque de développement bactérien est important et nécessite un procédé d’assainissement de l’eau, principalement par le chlore. L’eau chlorée est désinfectée mais est aussi désinfectante. Cependant, une forme indésirable de chlore existe, le chlore combiné, résultant de la réaction avec la sueur, les peaux mortes, les cheveux et les urines. Cela génère des sous-produits du chlore tels que le chloroforme et les chloramines, rendant l'eau allergène et irritante pour les yeux. Avec une forte odeur chlorée, ces composés sont classés comme cancérigènes et peuvent être responsables d'asthme. Par ailleurs, au cours de mes études, j’ai découvert que le risque cariogène est plus élevé chez certaines professions, telles les boulangers et les nageurs compétiteurs. Cela m’a incité à comprendre pourquoi, alors que certaines études suggèrent que l’eau chlorée agirait comme un bain de bouche protecteur contre les bactéries cariogènes, mais perturberait le microbiote buccal.

Quels sont les effets délétères de cette eau chlorée sur les dents ?

H. S. : Les effets délétères de l'eau chlorée sur les dents comprennent principalement l'érosion dentaire, un phénomène largement documenté dans la littérature scientifique depuis les années 1986. L'érosion dentaire est le processus de perte graduelle et irréversible des tissus durs de la dent résultant d'une exposition chimique, sans implication bactérienne. Cette dissolution est déclenchée par l'exposition à des acides présents dans l'eau des piscines, lorsque le pH descend en dessous de 6,5. De nombreuses études signalent une prévalence de l'érosion dentaire chez les nageurs réguliers. Les dents affectées présentent des signes tels que la translucidité et l'écaillage. Les premiers indicateurs de cette érosion peuvent se manifester par des dents d'apparence blanche crayeuse, pouvant évoluer jusqu'à la perte totale de l'émail.

Un autre effet néfaste du déséquilibre de l'eau chlorée est l'apparition de taches et de tartre sur les dents, accompagnées d'une coloration jaune à brun foncé, sans nécessairement provoquer une inflammation gingivale. Lorsque l'eau est trop douce, avec une dureté exprimée en degrés français inférieure à 10, elle peut devenir corrosive pour les dents. À l'inverse, une eau trop dure, avec une dureté supérieure à 25 degrés, peut conduire à un entartrage des dents. Ainsi, l'équilibre délicat de la qualité de l'eau dans les piscines est crucial pour prévenir ces effets indésirables sur la santé dentaire des nageurs.

La problématique est-elle connue des autorités sanitaires ou des nageurs ?

H. S. : Non le phénomène n’est pas connu, et dans le cadre de mes recherches, je projette de rédiger un article en collaboration avec ma directrice de thèse. L'objectif est de le publier dans une revue scientifique dentaire et de le référencer sur PubMed afin de sensibiliser les chirurgiens-dentistes à cette problématique. Parallèlement, j'ai l'intention d'informer les autorités compétentes, notamment les responsables de la Direction de la jeunesse et des sports ainsi que la Fédération française de natation, sur les défis liés à la qualité de l'eau dans les piscines.

Quels conseils donneriez-vous aux nageurs ?

H. S. : Les piscines en France sont souvent bien contrôlées. Le risque réside dans les piscines privées et à l’étranger. J’attire donc l’attention des propriétaires de piscine et des nageurs qui voyagent. Toutefois, chez les nageurs professionnels, le risque existe néanmoins, notamment un début de déminéralisation, même dans des piscines équilibrées, mais au bout de 10 ans de pratique, à raison de 20 heures par semaine. Tous les nageurs peuvent détecter le signe d’acidité de l’eau par son goût aigre. Enfin, l’hypersensibilité ressentie après une séance de natation est à considérer comme un signal d’alerte d’une eau déséquilibrée. Ces attaques acides peuvent être contrées et ralenties par l’utilisation de produits au fluor, comme un bain de bouche ou la mastication d’un chewing-gum au fluor et au xylitol juste après la natation.

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